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L’ouzbek muet et autres histoires clandestines

Luis Sepulveda (traduction Bertille Hausberg)

Ed. Metailié, 2015

arton1096Fini le sérieux léniniste compulsif. Luis Sepulvada, grand militant chilien devant l’éternel communiste, raconte sa lutte révolutionnaire armée. Il la déroule en une série de sketches croquignolesques. Son vieux qui lisait jadis des romans d’amour ouvre la voie à de drôles de zigotos. Du début à (presque) la fin, tout est branquignol.

Les militants Pieds nickelés veulent bien changer la société chilienne, mais plutôt après une bonne bouffe pour préserver leurs forces ! Ils mènent une « action révolutionnaire commune » à quatre du FARCH (Forces armées révolutionnaires du Chili). L’objectif : braquer une banque, à savoir « exproprier au nom du peuple les biens accumulés par la bourgeoisie » ! Dans le feu de l’action, ils se contactent par talkie-walkie : « allo Apollo, ici Houston ! ». Une des otages, du genre obsédée sexuelle, hurle exclusivement sa crainte d’être violée… L’un des zozos braqueurs, au visage peinturluré muant en « albinos », chante carrément « she wore blue velvet » pour apaiser l’effroi des otages !

Il y a Fantomas de la brigade international Simon Bolivar, Camillo mort par balle et transformé en champion de boxe post-mortem pour l’annoncer à son fils. Il y a le Péruvien étudiant en Ouzbékistan qui, pour revenir en Russie – moins sinistre – se déguise en ouzbek muet (à l’aide d’un pope) pour repasser la frontière. Il y a Moustik, demoiselle aux longues cuisses et aux jupes courtes qui émeut tous les mâles. Elle demande à un emmerdeur s’il veut « être révolutionnaire pour être heureux ou pour construire une société de types ennuyeux » comme lui. Il y a la fuite rocambolesque d’un prisonnier en route pour l’exécution, sauvé par des flics éméchés occupés à lutiner des prostituées. Il y a le condor offert à Fidel Castro qui s’envole de sa cage atterrit chez une vieille qui le prend et le cuisine comme un dindon ! Pour éviter l’incident diplomatique, on en trouve un autre… Il y a, etc.

Que dire des déboires de l’aide internationale aux militants qui fourgue des petits livres poussiéreux de Lénine ou autre mentor, mais ne songe pas à faire parvenir le papier nécessaire pour réaliser le moindre tract de lutte actuelle ?

Seul le dernier récit de Sépulveda est plein de gravité. C’est celui du « déserteur » présent lors des dernières heures du Che assassiné. Rien que pour la dignité de cette mort, il faut le lire. « Chacun doit être la copie d’un livre qui répète la même histoire ».

À lire donc avant toute prise d’otages !

Jane Hervé

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