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Chante-perce

Dominique Sampiero (textes, Maya Mémin (illustrations)

Ed. Apogée, 2015

arton1097Un livre qui se lit comme si on s’allongeait dans l’apaisement de l’herbe, l’émotion de la forêt, l’enchantement enfin de la pierre et des pierres. Les mots y sont un doux voyage à travers la nature et l’humain, dans la grande beauté de ce monde même défaillant.

« Tout parle dans un pays et le silence a une couleur bien à lui », écrit Dominique Sampiero. Le lecteur avance ainsi « nuage au cœur », « pierre dans les poches » avec la lumière du vent au « bout des lèvres ». Et moi, lectrice, j’entaille déjà cet écrit qui évoque « l’entaille des quatre vents », en lui donnant un coup de sabre pour pouvoir l’évoquer !

Il faut – bien au contraire – entrer mutique dans la coulée des mots, pénétrer l’univers de légendes aussi « vivantes que nos rêves », épouser le rythme de subtils paysages d’herbes lithographiées (Maya Mémin). Entendre cette voix qui enseigne l’écriture « aux élèves du vent », qui capte « les formes errantes de la nuit », qui apprend que « chaque homme nomme sa pierre » ou que la dame blanche – neige et poème à la fois -a signé un « pacte » avec les pierres.

Plus j’avance en transversal des pages, plus je pense à Xavier Grall jusqu’à ce que se découvre un long poème qui lui redonne vie : « Je viens d’un pays/de pas perdus entre hier/et maintenant ». Et de l’intime du poète émerge alors le pays réel de lutte et de hurlement, de salaires de misère, de bourses d’études…

Que dit-il alors ? Ses propres cheveux gris captent le gris du ciel et le tabac de l’aïeul. Il n’est pas impossible qu’il s’agisse de la « peur de mourir ». Rejoindre cette terre enfin par l’herbe nostalgique – maison-mère-corps-amour – qui sait inventer « des parfums sans nom ».

Reste à nous, lectrice avide, à se placer dans le premier rai de soleil, à l’aube, à se laisser envahir par ce chant de la « chante-perce ». Et si cet outil des tailleurs de pierre perçait jadis le granit des carrières, il leur offrait aussi un surnom pour la vie. À nous de chercher le nôtre entre le vent, la pierre, le châtaignier et l’herbe grise, tous ces habitants qui surgissent au fil de ce poème de toute nature.

Jane Hervé

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